SIMPLICITÉ
La façon créative dont les enfants interagissent avec leur environnement et utilisent leur corps en tant qu’outil pour se mouvoir est inspirante. Et si, de nouveau, on pouvait voir le monde de cette manière ? C’est un peu ce que permet une méthode d’entraînement fonctionnelle gagnant en popularité au Québec, la callisthénie, une approche progressive qui se pratique en tout lieu et avec de l’équipement minimal.
Le terme callisthénie provient du grec ancien kalós, qui signifie « beauté », et sthénos, qui se traduit par « force ». La callisthénie est ainsi l’art d’utiliser la force développée par le corps afin d’accomplir un mouvement esthétique. L’engouement pour la callisthénie à l’échelle mondiale semble récent, mais des éléments de cette méthode ont été retrouvés dans les sites d’entraînement des armées d’Alexandre le Grand et des Spartiates, datant de deux millénaires.
Pour exécuter les mouvements de callisthénie, seul le poids du corps est utilisé, comme en gymnastique. Cette discipline développe donc la force relative, qui ne sert pas à soulever des objets mais permet plutôt de déplacer son corps dans l’espace. Les exercices avec charge et ceux avec le poids du corps donnent une progression complètement différente. Prenons, par exemple, le développé couché (bench press) et les pompes (push-up), deux exercices qui impliquent les mêmes mouvements de certaines parties du corps.
Pour progresser au développé couché, on augmente la difficulté en ajoutant simplement plus de charge, encore et toujours. Dans le cas des pompes, un exercice fondamental en callisthénie, on ne peut augmenter la charge, puisque cette dernière est le poids du corps.
La solution est alors de modifier la position. En raison des lois de la physique, le déplacement du centre de masse du corps et la modification conséquente des leviers ont un effet sur la difficulté de l’exercice.
Ainsi, pour progresser avec les pompes, on peut surélever les pieds en les plaçant sur un objet, puis augmenter graduellement la hauteur lors de chaque entraînement. À l’inverse, pour rendre l’exercice plus facile, on peut poser les mains sur un banc. Chaque mouvement de callisthénie a ainsi sa série de positions, qu’on nomme progression, à travers laquelle l’adepte chemine, selon son niveau. De cette façon, les exercices en callisthénie sont continuellement en évolution, caractéristique qui rend la pratique particulièrement motivante.
La callisthénie se démarque des méthodes d’entraînement musculaire avec charge par son objectif premier. En effet, la pratique est orientée vers la réussite de mouvements plutôt que vers le renforcement des muscles ou des groupes musculaires. En d’autres mots, elle vise à améliorer le mouvement global et le fonctionnement du corps dans son ensemble, et non celui d’un muscle en particulier. Pour cette raison, l’approche est qualifiée de méthode d’entraînement fonctionnelle. Cela dit, le travail musculaire requis pour réaliser les exercices engendre nécessairement un gain de force et peut mener à la prise de masse musculaire. Mais plusieurs autres bienfaits sont également associés à la callisthénie. Par exemple, certains mouvements impliquent de se tenir sur une seule jambe, ce qui, à la longue, favorise le développement de l’équilibre.
Également, la variété de positions contribue à améliorer la mobilité des articulations dans tous les axes. Puisqu’aucune machine n’est utilisée, la proprioception, le sens qui permet à la personne de connaître la position des parties de son corps dans l’espace, est fortement sollicitée. L’amélioration de ce sens peut avoir des effets positifs, notamment sur la posture.
Et où peut-on pratiquer la callisthénie ? La réponse est simple : partout. Puisque l’équipement requis est minimal, on peut en faire au gymnase, à la maison (les enfants adorent ça) ou, encore mieux, dans les espaces verts. Le seul outil essentiel est une barre de traction ou un système de suspension. Pour le reste, les meubles de la maison et le mobilier urbain suffisent. La créativité est assurément stimulée lorsqu’on s’entraîne en callisthénie. Deux chaises deviennent des barres parallèles, une table joue le rôle d’une barre de traction, une branche d’arbre se transforme en un beau support pour des anneaux de gymnastique. Le regard qu’on porte sur son environnement se modifie en même temps que la relation avec les objets autour de soi.
Des sites d’entraînement extérieurs comprenant tout le matériel nécessaire pour la callisthénie sont aussi de plus en plus répandus dans les parcs des villes de la province. Pour les voyageurs, sachez que ce type d’installations se retrouve dans de nombreux pays. S’entraîner dans un parc permet de surcroît de faire du green exercise, un concept mis de l’avant dans le livre Green Exercise (R. Bragg et C. Wood, Green Exercise, Routledge, 2016).
Les auteurs y expliquent que les bénéfices psychologiques de l’activité physique en milieu naturel seraient supérieurs à ceux obtenus par la même activité pratiquée à l’intérieur. Ils soutiennent que bouger dans un espace naturel aide à chasser les soucis quotidiens, à stimuler l’imagination et à reprendre contact avec l’environnement.
Que l’on intègre quelques exercices de callisthénie à sa routine d’entraînement ou qu’on s’adonne pleinement à cette pratique, les bénéfices se feront sentir sur le plan tant physique que mental. De plus, dès que le pratiquant maîtrise assez bien les techniques, un monde de possibilités s’ouvre à lui. En effet, les exercices avancés, qui incluent, entre autres, le drapeau humain, les équilibres sur les mains et les tractions à un bras, offrent l’occasion d’explorer les limites de la force humaine à des niveaux surprenants. Accessible à tous, la callisthénie est idéale pour maintenir la motivation à s’entraîner et pour avoir du plaisir à le faire, et ce, en toute simplicité.