La littérature est le lieu de tous les possibles pour explorer amour et désir sous toutes leurs coutures. Entre perles épistolaires, éveil amoureux et légende familiale, voici trois suggestions qui exacerbent les passions.
La renarde et le mal peigné, de Pauline Julien et Gérald Godin (Leméac, 2009)
Elle était la passionaria de la chanson québécoise, lui un député poète qui faisait campagne à bicyclette. Ces précieux « fragments de correspondance amoureuse » entre « peau-line » Julien et « Gégé » Godin sont d’une telle modernité dans leurs sentiments qu’on ne pourrait dire qu’ils ont été écrits entre 1962 et 1993. Entre la maladie et les trahisons, le doute et la fulgurance, la scène et même les continents, émane le portrait à la fois insaisissable et instantané d’un amour qui traverse le temps et les tempêtes. À des années-lumière du long fleuve tranquille, leur dialogue incessant déborde d’admiration mutuelle. Comme disait Gérald à sa Paolina : « Je t’aime parce que tu veux aller plus loin, ne jamais te contenter de peu et de l’à-peu-près, d’une vie qui ne te satisferait pas pleinement. » Un incontournable pour revenir à l’essentiel des âmes qui s’entrechoquent.
Appelle-moi par ton nom, d’André Aciman (Grasset, 2018)
D’abord paru en 2008 sous le titre français Plus tard ou jamais, ce roman d’André Aciman, auteur américain d’origine italo-turque, reparaît juste à temps pour la Saint-Valentin, dans la foulée de son excellente adaptation au cinéma, Call Me by Your Name, pilotée par le scénariste James Ivory et le cinéaste italien Luca Guadagnino. On y suit Elio le mélancolique, durant l’été de ses 17 ans, alors qu’il tombe sous le charme d’Oliver, un universitaire américain en stage auprès de son père professeur. Dans la villa familiale, sur la côte italienne, la confusion des sens et le désir naissant s’emmêlent avec langueur et fracas. Contrairement à sa version filmique, le roman s’aventure aussi au-delà de l’été initiatique pour explorer le territoire mystérieux des souvenirs. Sans oublier, en filigrane, une relation père-fils d’une profonde humanité. Un objet d’une sensualité remarquable.
Mon étincelle, d’Ali Zamir (Le Tripode, 2017)
Aux Comores, ces « îles de la lune », une jeune fille prénommée Étincelle expérimente les turbulences des premières amours comme celles d’un vol d’avion où sa mythologie familiale refera surface, car après tout, le « voyage, comme l’amour, nous donne des ailes à la fois insolentes et chevaleresques, insupportables et audacieuses, dangereuses et salvatrices ». Témoignant avec brio des couleurs inédites de son pays natal, Ali Zamir s’amuse à déjouer les codes du conte de fées par de multiples détours impayables, qui évoquent tous à leur manière les sacrifices auxquels il faut se résoudre pour s’accrocher dans cette vaste « salle d’attente » qu’est la vie. La rencontre des parents d’Étincelle, Douceur et Douleur, surplombe aussi tout le livre de son éclat unique. Une écriture au souffle chaud et imprévisible, portée par des vents d’ailleurs qui renouvellent le paysage.
Par Nicolas Gendron, Journaliste
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