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Michaël Bensoussan, gastroentérologue à l’hôpital Charles-Lemoyne à Longueuil, diagnostique et traite les maladies du tube digestif. Jean- François Lemoine est quant à lui agronome et travaille comme consul- tant auprès des agriculteurs pour les aider à améliorer leur production. Nous les avons reçus au Strøm spa nordique de Mont-Saint-Hilaire, et c’est avec grande générosité qu’ils ont partagé avec nous leurs connaissances, nous permettant d’en apprendre plus sur le lien entre l’industrialisation de l’alimentation et ses effets sur notre santé.

STROM LIVRERECETTES HD113 - Du champ à l’usine, l’impact de l’industrialisation de l’alimentation sur notre santé

Strøm spa nordique

Bonjour à vous deux. Michaël, pouvez-vous nous parler un peu du microbiote intestinal?

michaël bensoussan 

« Le microbiote désigne les bactéries avec lesquelles nous vivons en harmonie. Dans nos cavités nasales, dans nos bronches, sur notre peau, mais surtout dans notre tube digestif, où se retrouvent mille milliards de bactéries. Si l’on compte les cellules de tout le corps humain, de tous les organes, on en a cent milliards, soit dix fois moins. Nous sommes donc composés, en valeur absolue, de plus de matériel étranger que de matériel hérité de nos parents. Il y a 1200 souches bactériennes différentes, qui pèsent au total entre un kilo et un kilo et demi dans notre tube digestif. Sans elles, l’être humain serait incompatible avec la vie. Nous naissons avec l’intestin stérile et cette colonisation bactérienne commence au moment de l’accouchement, alors que le nourrisson est en contact avec la flore vaginale de la mère. L’allaitement poursuit ce travail lorsque le bébé met le sein de la maman, avec le microbiote de la peau de la maman, dans sa bouche. Dans les maternités au Québec désormais, quand un enfant naît par césarienne, on met un chiffon dans les parois vaginales de la mère et on enduit le bébé de cette flore vaginale, parce qu’on sait que ça fait partie du processus, dès les premières secondes de vie, du développement de sa flore intestinale.

Pourquoi est-ce si important ? Parce qu’on a réalisé qu’à la source de plusieurs maladies, digestives, neurologiques et même probablement cancéreuses, il y a un déséquilibre de cette flore intestinale. Quand le microbiote est équilibré, nous sommes en symbiose avec les bactéries. En situation de déséquilibre, certaines bactéries deviennent dominantes et luttent contre d’autres, pourtant bénéfiques à notre santé. C’est ce qu’on appelle une dysbiose. Celle-ci est présente chez les gens qui ont des maladies de l’intestin, de l’obésité, du diabète, et chez ceux qui ont une alimentation trop grasse, calorique et transformée. Du point de vue de la flore intestinale et du microbiote, nous devenons ce que nous mangeons.

Il y a quelques années, on disait que la flore intestinale jouait un rôle dans la digestion. Ensuite, on a compris qu’elle était impliquée dans le développement de maladies digestives. Et dernièrement, on réalise qu’elle communique avec les nerfs de l’intestin. Il y a 200 millions de neurones dans l’intestin, c’est pour ça qu’on l’appelle le deuxième cerveau. C’est l’organe du corps humain où l’on retrouve le plus de neurones après le cerveau. Les bactéries communiquent avec les 200 millions de neurones de l’intestin, qui eux-mêmes communiquent des millions de fois par seconde avec notre cerveau. Cela veut donc dire que les bactéries de notre intestin donnent des ordres à notre cerveau. Ça fait longtemps qu’on sait que le pouvoir du cerveau sur l’intestin est immense ; on se rend maintenant compte que l’inverse est probablement vrai aussi. »

jean-françois lemoine

« Pour les maladies de Crohn et les colites ulcéreuses, n’y a-t-il pas une dimension génétique ? »

michaël bensoussan 

« Évidemment! Mais dans notre microbiote aussi, il y a une partie génétique. C’est-à-dire qu’il est génétique- ment prédisposé. Avec toutes les cellules de surface de notre intestin qui vont plus ou moins adhérer à telle ou telle bactérie, chaque personne dans le monde a un microbiote différent. On peut identifier quelqu’un de manière plus certaine encore avec son microbiote qu’avec ses empreintes digitales ou l’iris de ses yeux. Il est unique à chaque personne : il est, d’une part, génétiquement codifié, et d’autre part, influencé par ce qu’on mange, entre autres. »

Strøm spa nordique

Est-ce dire que notre alimentation a le pouvoir de nous rendre malades?

michaël bensoussan 

« Ce que la littérature médicale nous dit, c’est qu’il y a beaucoup plus de maladies dans les pays de l’hémisphère nord que dans les pays moins développés, par exemple de l’hémisphère sud. C’est d’autant plus vrai en gastroentérologie : nous sommes le pays au monde où il y a le plus de colites ulcéreuses par personne. Ce qu’on sait également, c’est que quand des populations issues d’autres pays et d’autres génétiques immigrent au Canada, elles se retrouvent à avoir la même quantité de maladies que les gens nés ici. Il y a donc à l’évidence des problèmes ici qui génèrent des maladies.

Si je connaissais ces problèmes, je vous les nommerais avec plaisir. On les trouve au fur et à mesure que la science progresse, mais après, on peut aussi raisonner avec notre gros bon sens. Quelle est la différence entre un pays industrialisé comme le nôtre, et des pays moins industrialisés? Ce sont les polluants, atmosphériques ou dans l’eau, et qui se retrouvent dans le sol, où pousse la nourriture que l’on consomme. Mais surtout, c’est l’industrialisation, l’ultratransformation des aliments. Il faut comprendre que tous les aliments qui sont issus de la terre sont transformés, ne serait-ce que quand on les apprête pour les manger. L’ultratransformation, c’est encore autre chose, c’est le processus industriel qui transforme les aliments à l’aide de composés chimiques qui sont en général des conservateurs, des agents de saveur, etc. Et quand on commence à mettre ce genre de composés dans la nourriture que l’on consomme, on ne peut plus tellement prédire quels effets ça aura sur le corps. Je crois pouvoir dire que les gens qui achètent leurs légumes chez un maraîcher, leur viande chez un boucher, leur pain chez un boulanger et leur poisson dans une poissonnerie n’auront pas de problèmes de santé liés à l’alimentation puisqu’aucun de ces produits n’est ultratransformé. »

jean-françois lemoine

« Et même s’ils présentent des traces de produits pesticides, issus de la façon dont ils ont été cultivés, manger des fruits et légumes est beaucoup plus profitable pour la santé que de ne pas en manger du tout ! »

michaël bensoussan 

« Tout à fait. Les gens n’ont qu’à consulter le guide alimentaire canadien, qui est extraordinairement bien fait. Il recommande des protéines animales ou alternatives, des protéines végétales, des produits laitiers, mais peut-être un peu moins qu’avant, bref une alimentation variée et locale le plus possible. Saviez-vous qu’on achète au Canada des haricots verts congelés qui poussent en Chine ? »

jean-françois lemoine

« Ça me renverse, car on en fait pousser de si bons ici ! Mais souvent, leur prix ne convient pas à l’épicier, qui préfère les importer. Il faut que les gens se renseignent sur la provenance des aliments, et qu’ils soient prêts parfois, hors saison, à payer un peu plus cher pour acheter local. Par exemple, mes enfants et moi som- mes des amateurs de cornichons à l’aneth. Et pourtant, même si les concombres, ça pousse au Québec, je n’arrive pas à trouver, dans aucune des épiceries où je vais, un pot de cornichons local. Les concombres viennent de l’Inde, et ont peut-être été arrosés avec des produits pesticides qui sont interdits ici. »

michaël bensoussan 

« Alors que c’est si facile à faire maison! On devrait se redonner le temps de cuisiner malgré nos rythmes de vie effrénés. On consommerait tellement moins de produits ultratransformés; ça changerait tout! Il y a 30 % à 40 % des gens qui consultent en gastroentérologie pour des pathologies digestives dites fonctionnelles comme le côlon irritable, c’est-à-dire qu’il n’y a pas de maladie sous-jacente. Ces pathologies sont au moins à moitié liées à notre mode de vie, au stress, et surtout à ce qu’on mange. On prend ce qu’on arrive à attraper au passage, un morceau de pizza en marchant, un sandwich en répondant à des courriels. Mais quand on a un intestin fragile, il faut s’asseoir, manger un repas de préférence chaud, qu’on vient de préparer avec de bons ingrédients, couper son téléphone, boire quelques gorgées d’eau pour s’hydrater en même temps. Quand on recommande à nos patients de faire ça, plus de la moitié de ceux ayant un problème de côlon irritable ou de dyspepsie, soit des problèmes d’estomac et d’œsophage, voient leurs symptômes disparaître comme par magie. C’est parce qu’ils se sont réapproprié le moment du repas, le geste d’ingérer de la nourriture. »

Strom IDSHiver22 HD 14 - Du champ à l’usine, l’impact de l’industrialisation de l’alimentation sur notre santé

Strøm spa nordique

Le gluten, dont on parle beaucoup ces dernières années, a-t-il un impact sur la santé des gens ?

michaël bensoussan 

« En 2022, entre 8 % et 10 % de la population canadienne est intolérante au gluten, et présente donc des ballonnements, des troubles digestifs. Une partie de ces gens ont en fait un intestin irritable, et c’est ce qui fait qu’ils ont du mal à digérer le gluten. Il y a ensuite 1 % à 2 % des gens qui sont atteints de la maladie céliaque, une maladie auto-immune déclenchée au niveau de l’intestin par l’ingestion de gluten et qui, à la longue, endommage l’intestin, occasionne des troubles sévères, de l’anémie, des carences nutritionnelles, et qui éventuellement peut cancériser.

Ce que l’on constate, c’est qu’il y a beaucoup plus de céliaques et d’intolérants au gluten qu’avant. La seule explication plausible que je vois est l’industrialisation du cycle du blé. Une fois qu’il est récolté, on en fait à peu près tout : du pain tranché qu’on trouve en supermarché auquel sucre, gras et sel sont ajoutés, et qui n’a donc plus grand-chose à voir avec du pain, jusqu’au pain au levain, fait par le boulanger qui en général travaille directement avec de plus petits producteurs, choisit ses farines et les mélange, pour offrir un produit beaucoup moins transformé. Pour le consommateur, tout est disponible et tout est possible. Mais est-ce que le rapport du consommateur au gluten et au blé a changé ces dernières décennies? Ma constatation de médecin est oui ! »

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Jean-François, qu’est-ce que le gluten et à quoi sert-il ?

jean-françois lemoine

« Toute la famille des poacées, dont les graminées, contient du gluten. Le gluten est composé de deux protéines, et peu importe le type de blé, le gluten est le même. Il est là pour que la semence germe, pour assurer la descendance du blé. Dans le produit fini, comme le pain, il assure l’élasticité, l’aération de la mie. Il y a des variations d’une céréale à l’autre, par exemple l’épeautre en contient beaucoup, d’autres céréales en contiennent moins, mais le gluten reste le même. Il y a au moins 50 types de blés qui poussent au Canada : des blés forts pour la farine, les pains plats, et d’autres pour les pâtisseries, du blé mou, tendre, roux, etc. Mais un champ reste un champ, et est toujours composé d’un seul type. »

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Comment se passe la culture du blé?

jean-françois lemoine

« Au niveau des fruits et légumes, il y a aujourd’hui des maraîchers qui cultivent sur des petites surfaces et qui peuvent vendre directement aux particuliers, car la ressource qu’ils produisent s’y prête bien. Elle est consommée directement, sans grande transformation, par le consommateur. Mais pour les céréales et les oléagineux comme le maïs, le soya, le blé, ça prend de grandes superficies pour en faire pousser. Par exemple, dans son jardin à la maison, on peut planter quelques plants de tomates et en manger presque tout l’été, mais si on devait planter du blé pour essayer de se faire un pain, on n’aurait pas assez de place ! La culture des céréales et des oléagineux est donc plus industrialisée au Québec que celle des fruits et légumes, car elle demande de grands espaces, de l’équipement import- ant, et implique une transformation considérable avant d’arriver au consommateur. Des facteurs d’efficacité, de productivité et de rentabilité entrent aussi en ligne de compte. On est huit milliards d’êtres humains sur Terre. Il faut le nourrir, ce monde-là, et ça il ne faut pas l’oublier. »

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En conclusion, quelles habitudes alimentaires pouvons-nous adopter pour favoriser la santé du microbiote et notre santé de façon générale?

michaël bensoussan 

« Manger de manière diversifiée. Quand on a une alimentation variée et équilibrée, cela se reflète sur la flore intestinale. On peut aussi la nourrir en lui donnant des produits vivants à manger, c’est-à-dire tout ce qui est fermenté : kimchi, kombucha, kéfir, choucroute, yogourt, miso…

Il ne faut pas avoir peur de catégories d’aliments complètes, tout est une question de dosage et d’utilisation. Il n’y a pas de mauvais aliment, dans ceux que nous donne Mère Nature. Il n’y a pas non plus de superaliment, c’est du marketing : il y a une diversité d’aliments. Comme le kale, c’est vrai que c’est bon, du kale, mais c’est bon du brocoli aussi, et de la laitue ! »

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